La compliance anticorruption issue de la loi Sapin II du 9 décembre 2016

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A la répression de la corruption, faut-il préférer la prévention de la corruption ? A cette interrogation, la loi du 9 décembre 2016 dite « Sapin II » apporte une réponse innovante.

 

Sans renoncer en rien au renforcement de la lutte contre la corruption – par l’incrimination tant attendue et enfin réalisée du trafic d’influence à destination d’un agent public au sein d’un Etat étranger -, la loi « Sapin II » offre enfin aux entreprises françaises les moyens juridiques de développer, avec pour appui la force de la loi, de véritables techniques de prévention de la corruption. Habitué à la seule mise en œuvre d’une politique publique anticorruption, le législateur entend désormais impliquer directement les entreprises dans la mise en œuvre des mécanismes de prévention de la corruption.

 

C’est ainsi que l’article 17 de la loi « Sapin » (loi malheureusement non codifiée) impose aux sociétés – quelle qu’en soit la nature – isolées ou en groupe - dotées d’un effectif et d’un chiffre d’affaires importants, de mettre en œuvre des mesures qui constituent l’architecture d’une nouvelle obligation de conformité anticorruption. La conformité est la voie suivie depuis longtemps pour lutter plus efficacement contre le blanchiment. Cette voie s’élargit désormais au phénomène de la corruption.

Le défi à relever est d’importance car, au-delà des enjeux d’un développement durable, il reviendra à chaque entreprise de se doter notamment de son propre code de conduite. Véritable code anticorruption, la rédaction de ce code se devra de permettre à l’ensemble des collaborateurs de l’entreprise de saisir les tenants et les aboutissants des agissements qui sont susceptibles de caractériser un acte de corruption.

L’identification de l’avantage indu – ou, selon l’expression consacrée, du pot-de-vin -, ainsi que la différenciation avec les cadeaux, les actes de sponsoring ou autres actions de promotion seront au centre des préoccupations des rédacteurs desdits codes. En particulier, des dispositifs d’alerte destinés à permettre le signalement de comportements non-conformes au code de conduite devront être élaborés, tout comme une véritable cartographie des risques liés à la corruption, cartographie elle-même associée à des procédures d'évaluation de la situation des clients, fournisseurs de premier rang et intermédiaires.

La Compliance anticorruption ne relève donc plus de la seule initiative entrepreneuriale, mais constitue une véritable obligation juridique dont la sanction présente la particularité d’être placée sous le contrôle d’une nouvelle instance : l’Agence française anticorruption.

Cette dernière est dotée du pouvoir – confiée à une commission des sanctions – de prononcer une sanction pécuniaire dont le montant peut atteindre 200 000 euros pour les personnes physiques et un million d’euros pour les personnes morales.

De la sorte, l’on comprendra aisément toute l’importance qu’il convient d’accorder à l’avenir au respect de l’obligation de conformité anticorruption et qui entre application dès le 1er  juin prochain !

 

Marc Segonds, Avocat et Professeur agrégé spécialisé dans la lutte contre la criminalité organisée et financière

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