La notion de bénéficiaire effectif en droit des sociétés est précisée

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Le bénéficiaire effectif d'une société à déclarer au RCS est identifié selon des critères de détention du capital ou de contrôle. A défaut d'identification possible selon ces critères, il faut déclarer le représentant légal de la société comme bénéficiaire.

A propos du  décret. n° 2018-284, 18 avr. 2018, art. 5 à 8 et 79 : JO, 20 avr.

Les sociétés non cotées et d’autres entités juridiques sont tenues de déposer au greffe du tribunal, pour être annexé au registre du commerce et des sociétés, un document identifiant leur(s) bénéficiaire(s) effectif(s) (C. mon. fin., art. L. 561-46 créé par ord. n° 2016-1635 du 1er déc. 2016).

Le bénéficiaire effectif est défini comme la personne physique qui contrôle directement ou indirectement l’entité, ou pour le compte de qui une opération est exécutée ou une activité exercée (C. mon. fin., art. L. 561-2-2).

Un décret du 12 juin 2017 (D. n° 2017-1094, 12 juin 2017 : JO, 14 juin) a fixé les modalités de dépôt et le contenu du document à transmettre au greffe, sans préciser, en revanche, la notion de bénéficiaire effectif, qui restait particulièrement floue et donc source d’incertitudes pour les déclarants.

Un décret du 18 avril 2018 dissipe ces incertitudes en précisant cette notion pour les différentes entités concernées, qu’il s’agisse de sociétés (C. mon. fin., art. R. 561-1), de placements collectifs (C. com. fin., art. R. 561-2) ou d’autres formes d’entité (C. mon. fin., art. R. 561-3).

Remarque : s’agissant du traitement de la partie du décret relative au bénéficiaire effectif des placements collectifs, voir la veille permanente du Dictionnaire Permanent Epargne et produits financiers.

Bénéficiaire effectif des sociétés non cotées

Le décret définit la notion de bénéficiaire effectif selon des critères de détention du capital ou de contrôle, en prévoyant une règle d’identification par défaut lorsque ces critères ne permettent pas de déterminer la personne physique bénéficiaire.

Critères principaux : la détention du capital ou le contrôle de la société

Au sein d’une société, sont considérées comme bénéficiaires effectifs, la ou les personnes physiques qui (C. mon. fin., art. R. 561-1, al. 1 mod.) :

  • détiennent, directement ou indirectement, plus de 25 % du capital ou des droits de vote de la société,
  • ou exercent, par tout autre moyen, un pouvoir de contrôle sur la société (C. com., art. L.233-3, I, 3° et 4°) :
    • en déterminant en fait, par les droits de vote dont elles disposent, les décisions dans les assemblées générales de cette société,
    • ou, lorsqu’elles sont associées ou actionnaires de cette société, en disposant du pouvoir de nommer ou de révoquer la majorité des membres des organes d'administration, de direction ou de surveillance de cette société.

Critère par défaut : la représentation légale de la société

L’apport majeur du décret réside dans la détermination du bénéficiaire effectif lorsqu’aucune personne physique n’a pu être identifiée selon les critères de détention du capital ou de contrôle.

Dans ce cas, conformément au droit européen (directive n° 2015/849/UE, art. 3.6 du 20 mai 2015), le bénéficiaire effectif est le ou les représentants légaux ou, si la société n'est pas immatriculée en France, leur équivalent en droit étranger qui représente légalement la société.

Concrètement, il s’agit (C. mon. fin., art. R. 561-1, al. 2 à 6 mod.) :

  • du ou des gérants des sociétés en nom collectif, des sociétés en commandite simple, des sociétés à responsabilité limitée, des sociétés en commandite par actions et des sociétés civiles ;
  • du directeur général des sociétés anonymes à conseil d'administration ;
  • du directeur général unique ou du président du directoire des sociétés anonymes à directoire et conseil de surveillance ;
  • du président et, le cas échéant, du directeur général des sociétés par actions simplifiées.

Le décret précise que lorsque les représentants légaux susmentionnés sont des personnes morales, le bénéficiaire effectif est la ou les personnes physiques qui représentent légalement ces personnes morales (C. mon. fin., art. R. 561-1, al. 7 mod.).

Remarque : en pratique, les sociétés déclaraient déjà, à défaut de bénéficiaire effectif identifié selon les critères de détention du capital et de contrôle, leur représentant légal, conformément aux exigences des greffes et aux recommandations de l’ANSA. Il convient de souligner que le décret ne lève pas les incertitudes sur certains cas particuliers tels que la détention du capital en démembrement de propriété, en copropriété indivise ou par un mineur. Sur ces points, on se reportera utilement à la fiche pratique publiée par le Conseil national des greffiers des tribunaux de commerce, accessible sur le site www.infogreffe.fr.

Bénéficiaire effectif des GIE et de certaines associations et fondations

Des entités juridiques autres que les sociétés sont assujetties au régime de déclaration des bénéficiaires effectifs, dont notamment (C. mon. fin., art. L. 561-46, al. 1 et 2) :

  • les groupements d’intérêt économique ayant leur siège en France et jouissant de la personnalité morale conformément à l’article L. 251-4 du code de commerce ;
  • les associations à but non lucratif ayant émis des obligations ;
  • les fondations ayant émis un ou plusieurs emprunts obligataires.

Comme pour les sociétés, le décret détermine le bénéficiaire effectif de ces entités selon des critères principaux et des critères par défaut.

Remarque : des dispositions spécifiques sont désormais prévues concernant la détermination du bénéficiaire effectif dans le cadre d’une fiducie ou de tout autre dispositif juridique comparable relevant d’un droit étranger, tel qu’un trust (C. mon. fin., art. R. 561-3-0 nouv.).

Critères principaux : la détention du capital ou le contrôle de l’entité

Pour ces entités juridiques, sont considérées comme bénéficiaires effectifs, les personnes physiques qui (C. mon. fin., art. R. 561-3, al. 1 à 5 mod.) :

  • sont titulaires, directement ou indirectement, de plus de 25 % du capital de la personne morale,
  • ou ont vocation, par l'effet d'un acte juridique les ayant désignées à cette fin, à devenir titulaires, directement ou indirectement, de plus de 25 % du capital de la personne morale,
  • ou disposent d'un pouvoir de nommer ou de révoquer la majorité des membres des organes d'administration, de gestion, de direction ou de surveillance de la personne morale,
  • ou exercent, par d'autres moyens, un pouvoir de contrôle sur les organes d'administration, de gestion, de direction ou de surveillance de la personne morale.

Critère par défaut : la représentation légale de l’entité

Là encore, le décret prévoit l’hypothèse dans laquelle aucune personne physique n’a pu être identifiée selon les critères principaux.

Dans ce cas, le bénéficiaire effectif est la ou les personnes physiques qui représentent légalement la personne morale. Concrètement lorsque l’entité concernée est une association, une fondation ou un groupement d'intérêt économique, le bénéficiaire effectif est :

  • le ou les représentants légaux de l'association ;
  • le président, le directeur général ainsi que, le cas échéant, le ou les membres du directoire de la fondation ;
  • la ou les personnes physiques et, le cas échéant, le représentant permanent des personnes morales, désignées administrateurs du groupement d'intérêt économique.

Précisions relatives aux modalités déclaratives

S’agissant des modalités déclaratives, le décret précise que le document relatif au bénéficiaire effectif peut être transmis par voie électronique et signé électroniquement via un procédé fiable d'identification garantissant le lien entre la signature et le document (C. com., art. R. 123-77, al. 2, mod.).

Entrée en vigueur

Les dispositions du décret relatives à la notion de bénéficiaire effectif sont entrées en vigueur le 21 avril 2018.

Pour rappel, la déclaration du bénéficiaire effectif est obligatoire, lors de l’immatriculation, pour les sociétés créées depuis le 1er août 2017. Les sociétés créées antérieurement à cette date étaient, quant à elles, tenues d’effectuer cette déclaration avant le 1er avril 2018.

En outre, tout fait ou acte nécessitant de rectifier ou de compléter les informations mentionnées dans la déclaration doit donner lieu, dans un délai de trente jours, au dépôt d’un nouveau document (C. mon. fin., art. R. 561-55, al. 1).

 

Alexandra Pham-Ngoc, Dictionnaire permanent Droit des affaires

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