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Publié le - Mise à jour le
L’article L. 1225-4 du Code du travail pose un principe clair : « Aucun employeur ne peut rompre le contrat de travail d’une salariée lorsqu’elle est en état de grossesse médicalement constaté, pendant l’intégralité des périodes de suspension du contrat de travail auxquelles elle a droit au titre du congé de maternité, qu'elle use ou non de ce droit, et au titre des congés payés pris immédiatement après le congé de maternité ainsi que pendant les dix semaines suivant l'expiration de ces périodes. »
Toutefois, l'employeur peut rompre le contrat s'il justifie d'une faute grave de l'intéressée, non liée à l'état de grossesse, ou de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à la grossesse ou à l'accouchement. Dans ce cas, la rupture du contrat de travail ne peut prendre effet ou être notifiée pendant les périodes de suspension du contrat de travail mentionnées au premier alinéa ».
Période de protection absolue pendant la suspension du contrat de travail c'est-à-dire depuis la loi du 8 août 2016, non seulement pendant le congé maternité mais également pendant les congés payés pris immédiatement après ce dernier. La Cour de cassation ayant en 2016 précisé que les congés conventionnels supplémentaires « n'instaurent pas une période de protection de la salariée interdisant ou limitant le droit, pour l'employeur, de procéder à un licenciement » (Cass. Soc., 14 décembre 2016, n°15-21.898).
Période de protection relative pendant les autres périodes, l’employeur étant autorisé à licencier la salariée, s’il justifie de l’un des motifs énumérés limitativement par le texte susvisé.
En pratique, la jurisprudence admet rarement le bien-fondé du licenciement- toute exception doit s’interpréter restrictivement- et rejette notamment le licenciement pour motif économique, faute pour l’employeur de caractériser l’impossibilité de maintenir le contrat de travail, si ce n’est dans l’hypothèse d’une cessation d’activité (Cass. Soc., 26 septembre 2012, n°11-17.420 ; Cass. Soc. 24 octobre 2012, n°11-21.500).
Quel que soit le motif invoqué, la Cour de Cassation exige que le juge du fond vérifie que le motif invoqué n’est pas lié à l’état de grossesse.
Par ailleurs, sur le fondement de l’article 10 de la directive 92/85/CEE du 19 octobre 1992, la Cour de cassation interdit les mesures préparatoires au licenciement, durant les périodes de protection peu importe que le licenciement soit notifié hors période de protection.
Qu’entend-on par cette notion ? Le remplacement définitif de la salariée qui montre que la décision de licencier est déjà prise (Cass. Soc., 15 septembre 2010, n°08-43.299), et le fait d’aborder avec la salariée les modalités de son licenciement économique peu importe qu’il s’agisse d’un licenciement collectif (Cass. soc., 1er février 2017, n°15-26.250).
Les tribunaux ont été amenés à juger de cas plus atypiques ou plus exactement à trancher entre la protection de la salariée enceinte et l’obligation édictée par le Code du travail de procéder à la rupture du contrat de travail.
Tel a notamment été le cas :
- D’une salariée déclarée inapte : si le reclassement est impossible, le législateur impose à l’employeur, par une disposition dissuasive à savoir la reprise du salaire à l’issu du délai d’un mois, de licencier la salariée, mais dans l’hypothèse où cette dernière déclare qu’elle est enceinte, s’agit-il d’une impossibilité de maintenir le contrat de travail ?
La Cour de Cassation semble répondre par l’affirmative à condition de motiver la lettre de licenciement en ce sens (Cass. soc., 3 novembre 2016, n°15-15.333).
- D’une salariée étrangère non munie d’une autorisation de travail car non renouvelée :
La Cour de Cassation neutralise la protection édictée par l’article L. 1225-4 du Code du travail et juge que « les dispositions d'ordre public de l'article L. 8251-1 du Code du travail s'imposant à l'employeur qui ne peut, directement ou indirectement, conserver à son service ou employer pour quelque durée que ce soit un étranger non muni du titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France, une salariée dans une telle situation ne saurait bénéficier des dispositions légales protectrices de la femme enceinte interdisant ou limitant les cas de licenciement » (Cass. soc., 15 mars 2017, n°15-27.928).
Si dans cette dernière hypothèse, le licenciement pourra intervenir y compris pendant la période de protection absolue, ce n’est pas le cas dans l’hypothèse de l’inaptitude.
Certes les dispositions relatives à l’inaptitude ne sont pas d’ordre public mais auront un coût certain pour l’entreprise dans la mesure où celle-ci est contrainte de reprendre le paiement du salaire.
Comment appliquer en pratique un principe clair ? De la théorie à la pratique, le chemin est tortueux.
Martine Riou – Avocat à la Cour
Coblence & Associés