Convaincre en CHCST : de nouveaux arguments scientifiques !

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Le 2 mars dernier se tenait à Paris une journée débat de l’organisme EUROGIP [i] sur le thème « La santé-sécurité au travail, un levier de performance pour l’entreprise ». Professionnels de la prévention, scientifiques, partenaires sociaux et représentants des pouvoirs publics ont débattus des bénéfices sur la compétitivité des démarches de prévention. Etudes de cas à l’appui, un constat émerge : la prévention est rentable et bonne pour la performance. Résumé de quelques arguments qui peuvent servir les représentants du personnel et, au-delà, la santé et la sécurité de l’ensemble des salariés et agents !

Pour aller plus loin que les idées reçues : changer de vocabulaire

Un premier enseignement de cette journée est qu’il est dépassé d’opposer prévention et performance. L’argument selon lequel les actions en faveur de la protection de la santé et de la sécurité des salariés sont source de coûts appartient au passé. Chacun s’accorde à dire que prévention et performance sont liées étroitement… mais comment faire passer le message ?

Pour dépasser l’opposition binaire prévention-performance, une des pistes évoquées, qui peut intéresser les représentants du personnel au CHSCT, est d’adopter un langage « gestionnaire ». Cela consiste par exemple à promouvoir les actions d’évaluation de l’efficacité des actions engagées, notamment pour orienter les échanges sur le ratio coûts-bénéfices. Pour faciliter la décision d’engager des dépenses immédiates, il faut rassurer (et estimer ou chiffrer) sur ce que l’entreprise peut retirer à court, moyen et long termes – même s’il s’agit souvent d’effets indirects difficiles à quantifier à la virgule prêt :

  • Augmentation de la productivité du fait de la réduction de divers coûts liés aux accidents, absences, etc. ;
  • Hausse de la qualité de la production et de la fiabilité de la distribution ;
  • Amélioration de la qualité de vie au travail, de la fidélisation, de l’engagement du personnel, des capacités d’innovation, etc. ;
  • Obtention d’aides financières éventuelles (auprès de la CARSAT par exemple) ;
  • Gain d’image de l’entreprise auprès des clients ou employés potentiels ;
  • Participation à la Responsabilité Sociale de l’Entreprise (RSE).

Que disent les études scientifiques sur le sujet ?

Pour appuyer l’argumentaire, les représentants du personnel peuvent également citer une étude de 2011 qui fait référence [ii]. Conduite à l’international (sur 15 pays et auprès de 300 sociétés), cette étude a révélé qu’un investissement de 1 euros rapportait – en moyenne – 2,20 euros. Ce « chiffre magique » de retour sur investissement a par ailleurs été confirmé par d’autres études, comme celle de l’OPPBTP [iii] (qui a obtenu un ratio équivalent de 2,3 dans une étude auprès de 101 entreprises).

La preuve par un exemple très simple

En France, une entreprise de chauffage de 20 personnes est spécialisée dans l’installation de pompes à chaleur, planchers chauffants, systèmes de ventilation ou climatiseurs. Difficile pour cette PME sous-traitante de dégager des fonds pour investir en prévention. Pourtant, en vue de mieux protéger les salariés du risque électrique lors des raccordements et d’être moins dépendants d’un sous-traitant électricien, cette entreprise a envoyé un de ses salariés se former pour obtenir une habilitation éclectique (type B2V RR). Le coût de la formation, des frais de déplacement et de restauration engagés ainsi que ceux liés à l’absence du salarié (durant la formation, il n’est pas sur les chantiers) a pourtant été rapidement compensé : l’entreprise estime que la rentabilisation s’est faite en seulement quelques mois et qu’au final, le ROI (retour sur investissement) est de 2,05 euros ! De plus, l’entreprise bénéficie désormais de compétences internes permettant de maîtriser totalement le processus de fourniture, de pose et de branchement des appareils qui était auparavant en partie sous-traité.

Dans cette situation, il ne s’agit donc pas uniquement de former un salarié mais de coupler cette formation à une réflexion plus globale : la maîtrise d’un processus auparavant partiellement sous-traité est à la fois une source de gains et gage d’une plus grande indépendance de l’entreprise. La logique santé-sécurité et stratégie-performance est ici très simplement illustrée. De quoi inviter les membres du CHSCT à explorer ces pistes pour trouver de nouveaux arguments et convaincre – tout en améliorant à la fois la protection des salariés au niveau de leur santé… et de leur emploi ! Une entreprise performante est une entreprise durable, et c’est aussi et surtout une entreprise « en santé » comme disent nos cousins québécois.

Stéphan Pezé
Consultant-formateur Santé et Sécurité au travail
Formateur pour Elegia


[i] Organisme français dédié aux questions d’assurance et de prévention des accidents du travail et maladies professionnelles (http://www.eurogip.fr/fr/)

[ii] Accéder à l’étude en question (en anglais) : cliquez ici.

[iii] OPPBTP : Organisme Professionnel de Prévention du Bâtiment et des Travaux Publics (voire l’étude en question en cliquant ici.

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