Le document unique après l’ANI du 10 décembre 2020

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Les partenaires sociaux se sont entendus sur un accord national interprofessionnel (ANI) sur la santé au travail le 10 décembre dernier. Une proposition de loi a ensuite été déposée juste avant Noël pour transposer cet accord. Dans les dispositions de ces deux textes très proches, le document unique est plusieurs fois mentionné. Quelles nouveautés en attendre ?

L’ANI

L’accord, fruit de longs mois de négociation, a été finalement signé par la majorité des partenaires sociaux, à l’exception de la CGT. Il s’intitule « Pour une prévention renforcée et une offre renouvelée en matière de santé au travail et conditions de travail ». Le texte de 27 pages est organisé en quatre parties :

  • Promouvoir une prévention primaire opérationnelle au plus proche des réalités du travail (pages 2 à 12) ;
  • Promouvoir une qualité de vie au travail en articulation avec la santé au travail (pages 12 à 15) ;
  • Promouvoir une offre de services des Services de Prévention et de Santé au Travail Interentreprises (SPSTI) efficiente et de proximité (pages 15 à 23) ;
  • Une gouvernance rénovée, un financement maîtrisé (pages 23 à 26).

 

L’accord est globalement salué et contient quelques grandes avancées : concernant la prévention de la désinsertion professionnelle, la traçabilité du risque chimique et le suivi des formations à la sécurité ou encore le recours à des médecins de ville (formés et volontaires) pour assurer une partie de la surveillance médicale des salariés. Nous allons développer ici plus particulièrement les dispositions portant sur le document unique.

 

Le document unique dans l’ANI : trois nouvelles propositions

La section 1.2.1.2. de l’accord est intégralement dédiée au document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP). Une première sous-section fait un état des lieux concernant le document unique, revenant sur son objet et les modalités de son élaboration. Une première nouveauté affleure néanmoins ici : il est précisé que ce document doit être « aisément accessible par le salarié, y compris après avoir quitté l’entreprise (pour la partie qui le concerne) selon une procédure à définir » (p. 5). Cette disposition est d’ailleurs reprise dans la proposition de loi qui a été déposée par les députés LREM à l’assemblée nationale le 23 décembre dernier.

 

Une deuxième sous-section insiste sur le plan d’action qui doit découler du document unique. Alors que le texte de l’accord se borne à rappeler que ce plan d’actions doit être planifié, que les modalités de déploiement des actions doivent être précisées et les moyens techniques, humains et financiers nécessaires alloués, la proposition de loi est plus précise. La seconde nouveauté serait d’inscrire de façon claire dans le Code du travail – dans un projet d’article L. 14121-3-1 – le fait que le programme annuel de prévention des risques professionnels et d’amélioration des conditions de travail (qui existe déjà) découle du document unique. Plus précisément, que le document unique comprend, outre les résultats de l’évaluation des risques, « les actions de prévention et de protection qui en découlent ». L’ANI a ainsi incité à intégrer explicitement et formellement le plan d’action au document unique.

 

Mais il y a plus : la proposition de loi précise le contenu du plan d’action : celui-ci serait composé de « la liste détaillée des mesures devant être prises au cours de l’année à venir … ainsi que, pour chaque mesure, ses conditions d’exécution et l’estimation de son coût », que l’employeur « identifie les ressources de l’entreprise pouvant être mobilisées » et y adjoint « un calendrier de mise en œuvre ».

 

Une dernière sous-section fait du DUERP un outil d’aide à la traçabilité des expositions. Comment cela ? En proposant de rendre obligatoire la conservation des versions successives des DUERP dans l’entreprise. Les partenaires sociaux plaident d’ailleurs dans l’accord pour une numérisation du document unique. A la lecture de la proposition de loi, on comprend que les versions successives archivées du DUERP seraient accessibles aux mêmes instances et personnes que celles qui ont déjà accès au document unique.

 

Cette conservation a une implication particulière pour la prévention du risque chimique et en particulier des agents cancérogènes mutagènes et reprotoxiques (CMR). En effet, le texte de l’accord insiste sur deux éléments à ce sujet : (i) « la traçabilité collective doit permettre d’évaluer la polyexposition des salariés aux produits chimiques du fait de l’effet combiné qu’ils peuvent produire » et (ii) « la traçabilité des expositions … doit permettre le repérage des salariés devant faire l’objet d’un suivi post professionnel et post exposition ».

 

 

L’ANI du 10 décembre ne se résume pas aux dispositions portant sur le document unique que nous avons détaillé ici. Dans les mois prochains, nous aurons sans doute l’occasion de commenter les implications des dispositions de cet accord tout en tenant compte des débats parlementaires qui débuteront en février à l’occasion de l’examen de la proposition de loi du 23 décembre qui en découle.

 

Stéphan Pezé

Consultant-formateur Santé et Sécurité au travail

Formateur pour Elegia et auteur de « Les risques psychosociaux : 30 outils pour les détecter et les prévenir »

 

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