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Publié le - Mise à jour le
Dans le cadre d'une réorganisation, l'employeur ne doit pas minimiser les conséquences de celle-ci sur la santé et la sécurité de ses salariés. S'il n'évalue pas les risques, il s'expose à la suspension de sa mesure et à une condamnation pour violation de son obligation de sécurité de résultat.
La Cour d'appel de Versailles donne une illustration intéressante des conséquences graves sur la santé des salariés de la mise place d'une nouvelle organisation. Elle rappelle que le juge peut suspendre le projet dès lors qu'il constate que ce projet (en l’espèce, le déploiement de nouveaux outils informatiques) est attentatoire à la santé des salariés. Elle rappelle en outre que a intérêt à agir pour demander la suspension d'une mesure.
Début 2015, une société réorganise son activité dans le but d'harmoniser et de simplifier les outils informatiques notamment pour les commerciaux et les techniciens. La réorganisation s’accompagne d’un PSE sur 71 salariés qui sera validé par l'administration. Suite à la phase d’information-consultation donnant lieu à un avis défavorable du CHSCT, l'entreprise met en place son projet de réorganisation comme prévu à titre expérimental dans une seule région française. Le contentieux se concentre par la suite sur les risques psychosociaux découlant de cette mise en place.
En effet, quelques mois plus tard, le CHSCT vote une expertise "risque grave" compte tenu des risques psycho-sociaux engendrés notamment par l'apparition du nouveau logiciel. Le rapport de l’expert révèle que le modèle organisationnel est "alarmant et pathogène". Le CHSCT exerce son droit d’alerte pour danger grave et imminent et saisit le tribunal de grande instance pour suspendre la mise en œuvre du projet et interdire sous astreinte le déploiement du logiciel dans d’autres régions.
La cour d’appel de Versailles démontre que l’employeur a manqué à son obligation de sécurité de résultat en appliquant le raisonnement issu de l’arrêt "Air France" rendu par la Cour de cassation le 25 novembre 2015. L’employeur a-t-il pris les mesures de prévention en amont visant à éviter tout risque pour la santé des salariés ? Si des risques sont constatés, l'employeur a-t-il pris des mesures permettant d'y mettre fin ? La cour d’appel constate les éléments suivants pour conclure à la violation par l'employeur de son obligation de sécurité de résultat :
La Cour d’appel, à l’appui de tous ces éléments conclut que l’entreprise ne respecte pas son obligation de sécurité de résultat issue de l’article L. 4121-1 du code du travail. Par conséquent, elle suspend l’expansion de la réorganisation dans toute l’entreprise. Concernant la région concernée, la cour affirme qu’il faut attendre l’évaluation finale des risques psychosociaux suite à la mise en demeure par la Direccte.
La cour d’appel continue à utiliser l'expression "d’obligation de sécurité de résultat" de l’employeur ce que se garde bien de faire la Cour de cassation depuis certains arrêts. Dans des arrêts récents du 6 décembre 2017, la Cour de cassation mentionne une obligation de prévention des risques professionnels. La chambre sociale n'a pas encore stabilisé sa jurisprudence sur ce point.
Une question annexe sur laquelle la cour d’appel répond est celle de la compétence du juge dans ce cas précis. Juge administratif ou judiciaire ? Cette réorganisation s’est accompagnée d’un plan de sauvegarde de l’emploi. En matière de PSE, il est clair que le juge administratif est compétent mais pour la réorganisation dans son ensemble la question reste ouverte. Pour la cour d’appel de Versailles, la compétence revient au juge judiciaire, il n’appartient pas au juge administratif de contrôler les conséquences du PSE sur la santé et la sécurité des salariés. Ni le Conseil d’Etat, ni la Cour de cassation n’ont pour l’instant pris position sur cette question.
Jean-Baptiste Davoine
Rédacteur pour actuEL HSE